Le lac Montjoie menacé… par la Sépaq
Par Ghislain Allard
Journaliste
Saint-Denis-de-Brompton — Les riverains sont inquiets. Avec l’agrandissement du parc national du Mont-Orford, la Société des établissements de plein air du Québec (Sépaq) et le ministère de l’Environnement refusent toujours d’interdire la présence d’embarcations extérieures sur le lac Montjoie à Saint-Denis-de-Brompton.
Visé par la première phase de l’agrandissement, le lac Montjoie est l’un des rares plans d’eau de la région à ne pas contenir d’espèces exotiques envahissantes, comme la moule zébrée ou encore le myriophylle à épis.
Selon Marthe Robitaille, vice-présidente de l’Association de protection du lac Montjoie (APLM), plus de 70 % des riverains puisent leur eau directement dans le lac. « C’est comme un joyau en Estrie. Il possède une qualité d’eau exceptionnelle. De 2017 à 2021, il y a eu une étude réalisée par Yannick Huot (CRNSG), professeur à l’Université de Sherbrooke. Il a procédé à des travaux d’échantillonnage sur 217 lacs dans l’est du Canada, dont le lac Montjoie. Seulement cinq n’avaient aucun produit contaminant organique. C’était en fait le seul lac au sud du Québec. Ça lui donne donc un statut particulier. Notre objectif, c’est de protéger ce lac contre les espèces exotiques envahissantes », raconte Mme Robitaille, qui est biologiste riveraine du lac Montjoie.
Si au lac on peut se vanter de posséder une eau aussi exceptionnelle aujourd’hui, c’est en grande partie grâce à l’avant-gardisme de l’Association de protection du lac Montjoie.
« C’est le premier lac au Canada à interdire les embarcations à essence. Dans les années 1970, un réseau d’égout y a été installé. Il n’y a donc pas d’eau usée à être déversé dans le lac Montjoie. Dernièrement, les riverains se sont engagés à interdire les embarcations personnelles extérieures sur le lac. La municipalité est prête à émettre un règlement dans ce sens », insiste Mme Robitaille.
Avec l’agrandissement du parc national du Mont-Orford, cet équilibre fragile est compromis. « Le ministère de l’Environnement vient de faire l’acquisition des terrains qui ne sont pas habités. Sous peu, ce territoire sera transféré à la Sépaq pour sa gestion. Et la Sépaq a un projet de développement du côté sud du lac pour la construction de chalets et d’une auberge afin de donner accès au public. Nous ne sommes pas contre cet accès au public. Par contre, nous ne voulons pas que les embarcations personnelles extérieures soient acceptées », de dire la biologiste.
D’ailleurs, la Sépaq applique une telle interdiction dans d’autres lac du Québec, dont le lac des Bouleaux, dans le parc national du Mont-Saint-Bruno.
« Pourquoi la Sépac viendrait-elle détruire tous les efforts de protection qui ont été fait au lac Montjoie depuis plus de 60 ans en quelques années. Tous les lacs autour sont atteints par les espèces exotiques envahissantes. Ça va donc devenir un lac comme tous les autres. C’est vraiment décourageant », termine la vice-présidente de l’Association de protection du lac Montjoie.
Et cette mesure ne coûte rien à comparer au coût relatif au traitement d’un lac victime des espèces exotiques envahissantes. D’ailleurs, le Bureau d’audiences publiques en environnement (BAPE) va dans le même sens en demandant l’interdiction des embarcations personnelles extérieures sur le lac Montjoie.
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